Sunflower est une fresque de science-fiction qui emprunte aux séries télévisuelles
un certain nombre de codes, dont l'organisation en épisodes et en saisons. J'ai fait l'erreur au départ d'appeler chaque épisode une « nouvelle ».
Erreur fatale qui m'a valu quelques commentaires acerbes (mérités car une nouvelle n'est pas un épisode) du type : « mais où est la fin de cette histoire
? ». La frustration était
d'autant plus grande que les épisodes
se terminent généralement par un « cliffhanger ». Bref, promis, je n'utiliserai plus ce terme impropre
de nouvelle pour la prochaine saison...
Voyons plus précisément ce que signifie cet
anglicisme. Le « cliffhanger » est une technique narrative essentielle des
romans-feuilletons et plus généralement de toute histoire
racontée sous la forme de
plusieurs épisodes. Ce
terme signifie littéralement
« personne suspendue à une falaise », ce qui illustre bien
l'objectif. Il s'agit en effet d'établir
une tension narrative sous la forme d'une « fin » ouverte visant à créer
un fort suspense. Le récit
s’achève alors avant son dénouement, à un point crucial de l’intrigue, laissant un personnage
dans une situation difficile. Autrement fit : «
Le personnage est pris au piège,
il est en danger : va-t-il s'en sortir ? Vous le saurez dans le prochain épisode ! » (source Wikipedia).
Le terme cliffhanger aurait été utilisé pour la première
fois par Thomas Hardy
en 1872, qui laisse Henry Knight dans une situation périlleuse dans son roman publié en feuilleton : « A Pair of Blue Eyes ».
La technique avait été déjà largement employée par Alexandre Dumas (1802-1870) et Eugène Sue (1804-1857), mais sans
lui donner de nom spécifique.
Comment ne pas citer également
l'histoire de « Shéhérazade » dans les contes des « Mille
et Une Nuits ». La plupart des textes proviendrait d'un ancien livre persan
intitulé « Hazār-afsāna » (Les Mille contes)
écrit vers le dixième
siècle, une période très riche
pour la péninsule arabique.
Tout le monde se souvient de cette histoire devenue un véritable mythe :
« Le roi de Perse, Shahryar, fait exécuter sa femme pour cause d'adultère. Prétendant que toutes les femmes sont perfides, il décide d'épouser chaque jour une vierge qu'il fait exécuter au matin de la nuit de
noces pour se venger. Shéhérazade, fille aînée
du grand vizir, se porte alors volontaire pour faire cesser le massacre, et met
au point un stratagème avec
sa sœur cadette Dinarzade. Après son
mariage, le soir venu, elle raconte une histoire palpitante au sultan sans la
terminer. Son époux veut
alors tellement connaître
la suite qu'il lui laisse la vie sauve pour une journée de plus. Ce stratagème
dura pendant mille et une nuits au bout desquelles le sultan abandonne sa résolution et décide de garder Shéhérazade auprès de
lui pour toujours, ayant reconnu ses qualités de cœur et d'esprit. » (Source
Wikipedia).
Depuis l'avènement
du cinéma et surtout des series
télévisées,
le cliffhanger est fréquemment
employé, surtout avant
chaque coupure publicitaire ou fin d'épisode,
pour stimuler le spectateur à suivre
l'histoire jusqu'à son dénouement final. Le site a-suivre.org donne une liste des cliffhanger parmi les plus célèbres, dont le fameux « Who shot J.R.? » qui clôtura la troisième saison de « Dallas » avec un coup de feu tiré sur le personnage. Ce cliffhanger suscita l'attente impatiente de plus de 80 millions de téléspectateurs.
Plus modestement, j'utilise le cliffhanger dans Sunflower non seulement pour tenir le lecteur en haleine et le fidéliser, mais surtout car cette
tension narrative est génératrice d'émotions. Elle peut éventuellement frustrer le
lecteur mais elle permet de
ne pas sceller le destin de certains personnages
à la fin d'un épisode
ou d'une saison.